7 mois d'immersion en Italie, à Bologne. Expérience inoubliable dont ce blog n'est qu'un aperçu, j'ai essayé de partager avec le plus grand nombre mes découvertes, mes voyages, et quelques réflexions sur ce pays qui me fascine tant.

Mois après mois

08 avril 2006

Elections 2006 (4): La campagne d'Italie

Le jour J est enfin arrivé. On va enfin savoir qui est éliminé du château de la Tsar Ac'. Qui a vécu cette campagne électorale ne peut qu'être soulagé de la voir se terminer.

D'ailleurs, plus que de l'avoir "vécue", j'ai vraiment l'impression d'y avoir "survécu". Imaginez un mois de "moi": "moi" je suis le meilleur, "moi" je suis le plus fort, "moi" je te baisse les impôts, "moi" je t'augmente ton niveau de vie, et, au bout du compte, "moi" je te casse les… couillons (et là je cite Berlusconi qui parle des électeurs de gauche).

Les propositions, plus ou moins décentes, ont fusé pendant ces dernières semaines. On a fait du populisme, à grand coup de surprises sur prises. Je fais référence à l'effet d'annonce de Berlusconi de dernière minute (au sens propre: à la toute fin du dernier débat télévisé Prodi-Berlusconi, quand l'adversaire Prodi ne pouvait plus répondre), de supprimer la taxe d'habitation sur la première maison. Cet impôt sert à financer les municipalités. C'est les maires qui sont contents… Et la dernière proposition en date (c'est-à-dire hier) de Berlusconi: l'éventualité d'annuler la taxe sur le ramassage des ordures! Rien que ça.

Berlusconi finit la campagne à bout de souffle. Ces dernières annonces ressemblent un peu aux propositions de la dernière chance. Les derniers sondages autorisés, la semaine dernière, donnaient la coalition de centre gauche de Prodi en avance sur la Casa delle Libertà de Berlusconi.

La campagne électorale s'est donc officiellement close cette nuit, à minuit, et comme en France, toute déclaration politique de la part des candidats est interdite jusqu'à la fin du scrutin, lundi après-midi. Jeudi et vendredi, les meetings se sont donc multipliés (comme les petits pains) dans toutes les grandes villes d'Italie. Les arcades de Bologne résonnent encore des injonctions de Fausto Bertinotti, leader du parti de la Refondation Communiste (photo de gauche... forcément!) ou de Romano Prodi lui-même, à voter pour le centre gauche.


Les 22 656 741 italiens et les 24 601 554 italiennes (qui fêtent d'ailleurs cette année les 60 ans de leur droit de vote: c'était le 2 juin 1946, pour le référendum sur la Constitution), auxquels il faut ajouter les 2 840 000 italiens à l'étranger, ont deux jours pour voter: dimanche toute la journée, et lundi jusqu'à 15h.

Après le premier des deux "exit polls" (expression très italienne désignant les sondages à la sortie des urnes) qui sera connu dès 15h, les premières projections seront normalement diffusées dès 16h30, les résultats étant affinés au cours de la soirée. Une belle soirée télé en perspective…

Un mot sur le vote en lui-même, car après 12 ans de majoritaire, cette élection inaugure le grand retour du proportionnel, réforme électorale menée par le gouvernement Berlusconi il y a 6 mois à peine. On parle donc maintenant de "proportionnel corrigé".

Proportionnel, car chaque parti obtient un nombre sièges proportionnel au nombre voix exprimées en sa faveur.

Corrigé, car des "seuils de représentativité", à savoir des pourcentages en-dessous desquels un parti n'obtient pas de sièges, et une "prime de majorité", qui assure un nombre de siège minimum à la coalition de tête, ont été mis en place. Il s'agit d'éviter une trop grande fragmentation du paysage politique qui rendrait le pays ingouvernable.

Concrètement, comme dans toute élection législative, chaque parti a donc présenté une liste de candidats, auxquels seront attribués proportionnellement les sièges par ordre d'apparition sur la liste. Le premier nom de la liste est bien évidemment celui du représentant du parti.

Mais le système proportionnel impose des listes bloquées, à savoir que les électeurs ne peuvent pas exprimer de "préférence" dans le choix des candidats, comme c'était le cas dans le système précédent, où le majoritaire prévalait. Il fallait alors écrire le nom du candidat préféré sur le bulletin de vote, et la personne obtenant le plus de voix passait alors en tête de liste.

Là, il est bien précisé sur toutes les affiches de la campagne qu'exprimer sa préférence est interdit (sous peine d'annulation du vote), et qu'il faut simplement tracer une croix sur le symbole du parti pour qui on veut voter.

Ce qui explique deux choses.

Sur les affiches électorales dans la rue, tous les symboles des partis sont rayés par une grosse croix noire.

Il s'agit donc d'inciter les gens à voter pour son parti, et non, comme je le pensais au départ, de petits malins qui manifestent leur refus des différents partis en barrant les symboles!







Cela explique également que presque tous les symboles des quelques 174 partis se présentant à ces élections ont été modifiés pour y ajouter le nom du candidat tête de liste. Les électeurs auront ainsi l'impression de voter pour le candidat.







Le bulletin de vote se présente donc sous la forme de deux feuilles (une rose pour la chambre des députés, et une jaune pour le sénat) de 65 cm de long et 23 cm de large chacune, sur lesquelles sont représentés dans des petites cases tous les symboles des partis en lice, regroupés par coalitions (à droite, une illustration de cette feuille électorale. Il manque bien sûr beaucoup de symboles).

Petite précision, pour le sénat, les électeurs doivent avoir plus de 25 ans, et le vote se fait sur échelle régionale (je rentre pas plus dans les détails, parce que sinon on s'en sortira jamais!).

Les partis politiques, bien que nécessairement regroupés dans des coalitions, prennent donc encore plus d'importance sur leur représentant, contrairement à la France où l'on vote avant tout pour un candidat. Cette réforme est d'ailleurs vivement critiquée par la gauche, car Prodi, le leader de la coalition de centre gauche, n'est à la tête d'aucun parti. Son nom ne peut donc apparaître sur aucun symbole de la fiche électorale. Le hasard fait bien les choses quand même…

Pour l'anecdote, cette nouvelle loi électorale n'a pas de nom, comme l'ancienne, qui s'appelait "Matarellum", du nom de son principal rédacteur. Comme personne ne semble vouloir en revendiquer la paternité, à gauche certains s'amusent donc à la considérer comme "illégitime"! Pas bête…

Il reste maintenant à prendre son mal en patience, et à attendre lundi après-midi pour en savoir plus sur les 5 prochaines années en Italie. Je serais personnellement bien incapable de pronostiquer le dénouement de cette "campagne d'Italie". Le pire des scénarios serait une égalité entre les deux formations, avec une solution de "grande coalition" à l'allemande. Les deux leaders se détestent tellement, leur conception de la politique est tellement opposée, que je n'ose même pas imaginer qu'ils puissent travailler côte-à-côte.

Suite et fin de cette série sur les élections au prochain numéro!

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu as raison c'est temps que ça finisse...moi non plus je n'en peux plus de tous ces meetings, ces affiches partout, les insultes, les tensions...les discussions qui finissent toujours par aboutir à la politique !!!! Basta ! Par contre j'ai hâte de savoir le résultat ! Ca fait un peu peur ! Vendredi j'étais à Naples et sur Piaaza Plebiscito il y avait un meeting avec Berlusconi, Fini et Casini...ça m'a fait froid dans le dos...

Anonyme a dit…

Hello anch'io sono française, parisienne je vis en Sicile a Catane depuis le mois d'Août; par amour de l'italie mais surtout de la Sicile . Mais quelles différencese entre ton NOrd et mon sud ! j'ai lu ton cyber journal avee attention, ici c'est tellement différent. Connais-tu Dominique Fernandze , un écrivain italianisant qui ha beaucoup écrit sur l'italie (et la sicile). J'ai découvert ces jours ci le site de Umberto Eco et Claudio MAGRIS que j'adore, unis pour lutter conre la berlusconisation des esprits. Si tu passes par là, arrêtes-toi. Je vis dans le parc de l'Etna, entre la mer et ce merveilleux volcan (j'y ai même été bloqué per une tempête de neige il y aqualques semaines, j'ai ainsi ma foto dans le journal et je suis passé sur la RAI (il n'y a pas que Berlusca !!

Anonyme a dit…

Ecco mon adresse informatique matus95@alice.it